Mardi 26 mars
Souvenirs de la maison des corps 6
Une excroissance improbable s’est formée sur sa joue droite.
Les cellules devenues folles de vieillesse ont bâti ce fanon extraordinaire au relief hercynien, aux couleurs improbables.
C’est du vivant qui se nourrit de la mort qui vient ou de la mort déjà au travail sur ce qui vit encore.
On ne peut séparer cette création de la créature au risque d’emporter la moitié du visage.
C’est extraordinaire, fantastique et bien réel, une chair surnuméraire joue sur la joue, jeu macabre de la peau, baiser hideux, sentinelle de la putréfaction à venir.
Ne pas regarder, c’est nier la mort et la vieillesse.
Regarder c’est se confronter à l’innommable qui est l’autre nom de la mort, c’est aussi l’apprivoiser, c’est être reconnaissant à la personne porteuse de ce monstre de nous avertir, ce que je porte, ce que je montre et que je ne vois pas c’est votre visage tôt ou tard.
Je vous propose une anticipation, une projection mais cette création fabuleuse c’est encore la vie.
Regardez, ne regardez pas, peu importe.
Je porte une obscénité, une chose qui n’a rien à faire là, un organe surnuméraire, ma seule création possible.
La dernière.